Pourquoi, monsieur Kilic, pourquoi m’avez-vous fait cela ? Pourquoi ? Pourquoi donc ? Vous n’aviez rien à me reprocher pourtant, non vraiment, je ne comprends pas… vous n’aviez aucune, aucune raison de m’en vouloir… J’ai beau chercher et chercher encore, je ne vois pas, monsieur Kilic, ce que vous auriez pu avoir à me reprocher… Et moi, monsieur Kilic, moi, je vous l’assure, c’est bien la première fois que j’ai à me plaindre de vous… Nous étions de si bons amis, jusque-là. Je ne vous l’ai jamais dit, monsieur Kilic, car entre amis on ne se dit pas ces choses-là, mais j’ai toujours été parfaitement heureux en votre compagnie, jamais je n’ai eu la moindre plainte à formuler contre vous… Non, monsieur Kilic, depuis quarante ans bientôt que je vous connais, je n’ai jamais formulé contre vous, même au plus profond de moi-même, même dans le secret de mon coeur, le moindre reproche, le moindre début de reproche… A la rigueur, peut-être que je vous en ai un peu voulu quelquefois de ne pas avoir parlé le wolof, et de m’avoir en quelque sorte obligé, toute ma vie, à vous parler en français, alors que moi j’aurais tellement aimé vous parler en wolof, surtout avec l’âge… La langue du pays natal, monsieur Kilic, vous savez, la langue maternelle, comme on dit, la langue qui vous a bercé dans les bras d’une jeune mère morte depuis longtemps, c’est quelque chose de si doux à l’oreille d’un vieil homme… mais je ne peux pas sérieusement vous en vouloir, monsieur Kilic, de ne pas avoir su le wolof, pas sérieusement, surtout qu’il me faudrait bien alors reconnaître que vous aussi, certainement, vous auriez aimé que je vous parle en turc, au lieu de m’adresser toujours à vous dans ce français que j’avais appris à l’école, que j’aime bien tout de même, comme j’ai aimé l’école, car j’ai aimé l’école, je vous l’ai si souvent expliqué, je l’ai aimée, ma petite école du Sénégal… Excusez-moi, une fois encore, monsieur Kilic, je sais que vous n’avez pas eu la chance de recevoir cette instruction qui m’a été donnée, je ne veux pas vous peiner en le rappelant, mais, oui, j’aimais beaucoup l’étude et la langue française, quand j’étais jeune, et j’aurais bien cru pouvoir devenir instituteur au Sénégal, comme mon frère Babacar… peut-être même professeur… Seulement la vie en a décidé autrement et c’est toujours elle qui décide, la vie, et la mort encore plus… Trop longtemps nous l’avons parlé, monsieur Kilic, ici, ensemble, ce français qui n’est bon que pour être la langue du travail, des papiers, des patrons… pas pour être la langue des vieux qui ont le grand désir et le regret sans bornes du pays natal… Mais ce n’est pas à vous que j’en fais le reproche… ce reproche-là, c’est à la vie que je le fais, à la vie, et c’est stupide aussi de faire des reproches à la vie qui est tout de même si bonne à vivre lorsqu’on a sur la terre un ami. Un ami, un seul ami, cela suffit à éclairer toute une triste vie, je l’ai toujours dit, monsieur Kilic, et je sais que vous étiez d’accord avec moi. Il faut l’admettre, que l’amitié rapproche des êtres que tout devrait séparer, et qu’elle ne les rendra jamais identiques… l’admettre, et s’en sentir heureux.
Non, vraiment, monsieur Kilic, je crois que depuis bientôt quarante ans que je vous connais, je n’ai jamais rien eu à vous reprocher, rien de sérieux, je veux dire. Nous avons toujours été de si bons amis, tous les deux. Et, vous vous souvenez, quand nous avons pris notre retraite, presque ensemble, et qu’on nous a calculé les papiers et tout ça, à peu près dans le même temps, et que nous avons découvert tous les deux que nos patrons n’avaient pas payé correctement leurs cotisations, et que nous n’avions droit à presque rien, et qu’il allait falloir solliciter, vous savez bien, ce fameux minimum, l’allocation solidarité, comme ils disent maintenant à la CAF… vous vous souvenez, hein, quel choc ça a été, après tous ces efforts pour retrouver partout les papiers et les attestations qui n’allaient jamais comme il aurait fallu… quelle douleur, quelle angoisse quand nous avons enfin compris qu’on nous avait volés… quarante ans de travail et comprendre qu’on n’avait jamais rien compris ! Eh bien, à ce moment, quand j’ai su qu’il allait falloir rester pour toujours en France pour pouvoir le toucher, ce minimum vieillesse si bien nommé, si tristement nommé, n’est-ce pas, monsieur Kilic… et que je ne reverrais plus mon Sénégal, que je ne reverrais plus mes frères au Sénégal, que je ne reverrais plus mes cousins au Sénégal, que je ne verrais plus jamais cette belle Magatte qui doit bien être aussi vieille que moi aujourd’hui et plusieurs fois grand-mère, mais que j’ai aimée, que j’ai tant aimée là-bas… vous le savez, monsieur Kilic, combien je l’ai aimée, ma belle Magatte dont les yeux luisaient de désir comme l’eau sombre du fleuve courant vers l’océan… A ce moment où j’ai compris que c’était pour toujours, la France, que c’était à jamais, l’exil, que je resterais ici comme une épave sur la plage, comme un bois flotté fatigué – car comment payer ne serait-ce qu’un seul voyage avec ce fameux minimum qui ne peut nous servir qu’à survivre ? Hein, comment le payer, le voyage, quand tous les mois sont creux ?… Ce qui m’a consolé, à ce moment terrible, monsieur Kilic, ça a été de me dire que vous aussi, vous alliez rester pour toujours, exactement pour les mêmes raisons que moi… vous aussi prisonnier du minimum, et plus encore de ces patrons qui autrefois n’avaient pas voulu payer pour vous… Me dire que vous alliez rester, voilà ce qui m’a soutenu… je peux vous le dire aujourd’hui, je crois que je me serais donné au fleuve à ce moment-là, au fleuve courant vers l’océan qui jadis me rappelait les yeux brillants de Magatte, si je ne vous avais pas eu à mes côtés… vous étiez un si bon ami… je me suis dit qu’ensemble, nous serions comme deux vieux frères… une famille, en somme, une petite famille d’amis… Et c’était vrai, monsieur Kilic, c’était vrai. A vos côtés je n’ai jamais senti la solitude… chaque jour notre partie de cartes au café de l’Archipel, notre kebab au Paradisio, et quand il faisait beau, la promenade tranquille au bord de la Loire, et nos conversations sans fin sur les bancs du parc… cela me suffisait pour être heureux. Et je crois que cela vous suffisait aussi, monsieur Kilic. Souvent, vous me le disiez : « Monsieur Diop, votre amitié suffit à rendre bleu le ciel gris d’ici, votre amitié est un soleil du soir qui réchauffe ma vieille existence… je regrette Istanbul, mais je peux me passer de revoir Istanbul, puisque je vous ai, monsieur Diop, à mes côtés. »
Alors, monsieur Kilic, pourquoi est-ce que vous m’avez fait cela, aujourd’hui ?
Pourquoi, monsieur Kilic ? Pourquoi ?
C’est vraiment du n’importe quoi, monsieur Kilic. Du n’importe quoi…
Cela a commencé au café L’Archipel, ce matin, quand je vous attendais à neuf heures précises pour la partie de cartes. Vous n’étiez pas à l’heure. C’était la première fois, monsieur Kilic, alors vous savez ce que c’est, comme on se tourmente et comme on pense et comme on s’inquiète… parce qu’on n’est pas habitué, et que n’importe quoi, c’est sûr, est si vite arrivé, et aussi parce que vous êtes déjà bien vieux, monsieur Kilic, exactement aussi vieux que moi, et qu’on ne sait jamais. Alors je me tourmentais à vous attendre, et j’avais beau suivre des yeux l’aiguille sur le cadran de ma montre, et fixer la porte vitrée recouverte d’affiches, vous, vous vous obstiniez à ne pas arriver, vous vous obstiniez à rester là-bas, dans votre foyer Sonacotra de la rue des Barattes. Même Mireille, la serveuse, qui s’étonnait… « Tiens, monsieur Kilic n’arrive donc pas ce matin ? C’est la première fois depuis… » Depuis seize ans, monsieur Kilic. C’était la première fois depuis seize ans, depuis le jour de votre retraite… parce qu’avant, bien sûr, neuf heures, ce n’était pas une heure pour la partie de cartes…
Au bout d’une heure que je m’étais rongé les sangs, à bavarder un peu avec Mireille, à vous attendre en regardant tourner l’aiguille des heures autour de mon vieux coeur qui s’affolait, je me suis dit qu’il valait mieux marcher jusqu’à chez vous… que cela me calmerait, et que j’allais sans doute vous rencontrer, sur le chemin… Je vous retrouverais, vous m’expliqueriez, tout s’arrangerait, et nous partirions ensemble aussitôt, pour notre petit tour au bord de la Loire. Ce n’est pas si grave, une partie de cartes, et nous pouvons très bien nous en passer, nous avons tout notre temps pour jouer aux cartes, et ce n’est rien du tout une heure de perdue, ce n’est plus rien du tout à notre âge une heure de plus ou de moins, c’est ce que je voulais vous dire, et c’est ce que j’ai dit avant de me lever à Mireille qui a été d’accord avec moi… Alors, monsieur Kilic, je ne marche pas bien, pas mieux que vous, mais je me suis mis en route, et je ne vous en ai pas voulu, pas du tout, car je savais bien que si vous étiez aussi en retard c’était que quelque chose d’inévitable vous avait retardé, et, vous le savez, je respecte tout ce que vous respectez, même si parfois cela me semble sans intérêt, mais entre vieux amis, on ne se juge pas, on ne doit jamais se juger, mais seulement s’accepter, monsieur Kilic, s’accepter, c’est justement ce qui rend l’amitié si précieuse… et si difficile aussi, monsieur Kilic, mais avec vous tout avait toujours été si facile…
Alors j’ai marché aussi vite que j’ai pu, j’ai couru, si on peut dire car est-ce que nous pouvons encore vraiment courir à notre âge ? … enfin j’ai marché aussi vite qu’il m’était possible, et, sans vous faire de reproches, il est bien loin, votre foyer de la rue des Barattes, encore plus loin que mon foyer Adoma de la rue Malakoff, il est vraiment bien loin de notre petit Archipel… et la rue du Moulin est bien raide, qu’elle est donc raide cette rue du Moulin ! Alors j’ai peiné, j’ai souffé sur la route, à marcher trop vite, à essayer de courir, j’ai cru que mon coeur allait céder… j’ai dû m’arrêter plusieurs fois et plusieurs fois j’ai manqué basculer. Ah, ce grand fatiguement, monsieur Kilic, ce grand fatiguement que j’ai eu, presque aussi grand que le vôtre. Je l’ai bien regretté à mon tour qu’il n’y ait pas de bancs au bord de la route… vous me l’aviez dit, monsieur Kilic, vous vous en étiez plaint vous aussi, depuis qu’on a refait la rue du Moulin, on a retiré tous les bancs… parce qu’on a peur que les gens qui n’ont pas comme nous la chance d’avoir un toit se couchent sur ces bancs la nuit pour y dormir… parce que dans ce pays on a tellement peur de tant de choses qui devraient faire pitié… alors que les vieux comme nous ont tellement besoin d’appuyer leurs dos fatigués et d’apaiser leurs coeurs tendus battant la mort comme des tambours de brousse… Sans vous faire de reproches, je sais bien que vous n’y êtes pour rien… j’allais aussi vite que je le pouvais, je courais, je vous assure, mais il m’a fallu plus d’une heure pour arriver chez vous… et tout ce temps je me disais que j’allais arriver trop tard, et que tout serait ma faute… Ah, je n’en pouvais plus, monsieur Kilic, et je vous dis cela sans malice aucune, je sais que vous n’avez pas choisi l’adresse. Que vous avez déjà été bien content qu’on vous la propose à nouveau, l’année dernière, après les travaux qu’il y avait eu dans votre foyer, cette chambre de 7,5 mètres carrés précisément où vous ne pouvez qu’à peine vous tenir debout entre le lit et le mur. Oui, c’était une chance pour vous cette chambre, parce que vous auriez très bien pu vous retrouver à l’hospice dans n’importe quel autre département – vous vous souvenez de monsieur Ramzi qui est parti en ambulance un jour, pour un hospice qu’on lui avait trouvé du côté de Laval ? – … et que je ne pouvais pas vous loger plus longtemps, à cause de ce fichu règlement, dans ma propre chambre. Ma belle chambre de 9 mètres carrés, au foyer Adoma qui n’accueillait que des jeunes gars vigoureux quand je suis arrivé, mais qui n’accueille plus guère aujourd’hui que des cheveux blancs fatigués comme moi… Non, je ne vous fais pas de reproches pour le trajet, monsieur Kilic, je sais bien que j’habite presque aussi loin, et que vous auriez eu autant de peine que moi à vous hâter jusqu’à mon foyer si, ce matin, c’était moi qui avais été absent à votre place – ce que j’aurais tellement préféré, monsieur Kilic, tellement… mais vous savez bien que nous autres nous ne choisissons pas grand chose et même à vrai dire jamais rien, et que déjà c’est une grande chance que nos deux foyers se trouvent dans la même ville et presque dans le même quartier de la même ville… et qu’il y ait dans ce petit café de l’Archipel où nous aimons nous retrouver cette Mireille presque aussi vive que Magatte la vive, cette Mireille si aimable et si bonne, qui jamais ne nous a obligés à consommer. Une chance extraordinaire en fait, car nous aurions pu être séparés, et obligés de parcourir des kilomètres en autocar pour nous rencontrer… comme il est arrivé à monsieur Pham et à monsieur Bellaoui, qui étaient comme nous les meilleurs amis du monde au temps où ils habitaient le même foyer, mais qui ne se voient plus aujourd’hui qu’une fois la quinzaine, et restent seuls comme de vieux rats tout le reste du temps… parce qu’on les a déménagés loin l’un de l’autre, et qu’ils ont peine à remuer leurs vieux os, et que cela fait si cher pour eux avec leur minimum, de prendre des trains ou des autocars, maintenant que de toute façon ils n’ont plus de vélo pour y poser leurs vieilles carcasses qui tiennent mal l’équilibre et ne pensent plus qu’à tomber…
Je ne vous fais pas de reproches non plus, monsieur Kilic, pour ne pas m’avoir ouvert votre porte, quand j’ai frappé… non, pas non plus pour cela, car je n’ai pas attendu longtemps avant d’ouvrir, même si vous n’aviez pas répondu. Et après tout il n’était pas difficile de pousser cette porte que vous aviez oublié de fermer.Je ne vous fais aucun reproche non plus pour ne pas m’avoir accueilli avec votre habituel sourire, quand je suis entré. Je sais que dans votre situation, c’était bien difficile, je comprends très bien que vous n’ayez pas pu…
Non, monsieur Kilic, ce que j’ai à vous reprocher, c’est tout autre chose… ce que j’ai à vous reprocher, ce que je ne peux pas du tout vous pardonner, monsieur Kilic, ce n’est même pas d’être resté là couché sur votre lit, immobile et sans respirer, car je sais bien que nous autres, nous ne choisissons pas de respirer ou de ne pas respirer, de dormir ou de ne pas dormir, non, ce n’est pas cela, cela je ne vous le reproche pas… même si tout de même j’ai un peu de mal à vous pardonner, monsieur Kilic, d’avoir eu cette idée sans me prévenir, monsieur Kilic, d’avoir regagné sans rien m’en dire à l’avance votre Istanbul natale et votre enfance perdue.
La nostalgie du pays natal, je sais ce que c’est, monsieur Kilic, croyez-moi, alors n’allez pas croire que je vous le reproche, d’être parti ainsi, soudainement, sur un coup de votre vieux coeur qui n’a pu résister, non, je ne vous en veux pas pour cela non plus : je sais que vous avez obéi à cette terrible nostalgie qui peut rendre fou et ingrat même le meilleur des amis…
Non, monsieur Kilic, de ce qui vient de vous rien ne peut avoir pour moi le goût des reproches et de l’amertume… Je vous ai donné sans réserve mon amitié, monsieur Kilic, je n’y ai mis aucune réserve, pour moi-même je n’ai rien gardé… Alors pourquoi, pourquoi m’avez-vous trahi à la fin, pourquoi m’avez-vous fait tout ce mal ? Car ce que je ne peux pas du tout vous pardonner, ce que je vous reproche amèrement, maintenant que je suis là, tout près de vous, à vous regarder dormir, à espérer vainement que votre haleine se ranime et que votre corps se réchauffe, ce n’est pas de m’avoir obligé à refermer vos paupières déjà froides – cela, vous savez bien que je l’ai fait volontiers, que même j’ai été heureux de le faire pour vous, moi plutôt qu’un autre. Non, ce que je vous reproche, ce qui me met vraiment en colère contre vous, ce que je ne pourrai jamais vous pardonner, vraiment jamais, monsieur Kilic, c’est de m’avoir laissé, monsieur Kilic, de m’avoir laissé tout seul.
Bonjour Carole… un ami de longue date qui s’en va le premier, c’est beau et triste à la fois…
Une des choses les plus tristes qui puissent arriver.
Une histoire très émouvante, ils étaient si démunis de tout qu’ils étaient comme un vieux couple qui se soutient jusqu’au bout. C’est beau et triste à la fois, on se doute bien que le survivant ne restera pas longtemps non plus. Vraie solitude.
On se demande toujours en voyant ces pauvres gens combien de temps ils peuvent « tenir ».
une histoire bien émouvante et cela doit être dur de perdre un ami de longue date
Merci, Flipperine
magnifique oraison, ode à l’humanité et l’amitié, par dessus la misère, vraiment superbe, Carole
Emma, merci pour ce beau commentaire. Merci pour tout !
Le plus beau et le plus lourd des cadeaux à laisser à un ami. Une plume superbe qui, elle, nous en dit long sur l’amitié et la fidélité.
Merci beaucoup, Ludmilla. Je suis heureuse de votre visite.
Avec plaisir ! il ne faut pas se priver de ce qui est beau à lire !
Un très beau texte porté par un élan et une bouffée d’amitié survolant les années comme une bourrasque!
Merci Mansfield.
Magnifique vraiment, Bravo
Merci Joëlle.
Il n’y a pas de misère dès lors qu’il y a de l’amour. Il y a bien sûr des difficultés quotidiennes, mais avoir quelqu’un à ses côtés, c’est avoir le soleil tout entier.
Alors, Monsieur Diop a bien raison de ne pas pardonner, son cœur n’y résistera pas.
Très beau texte, très juste quant aux conditions de vie de ces vieux immigrés.